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[Côte d’Ivoire : Fermeture systématique des cliniques privées] La plaidoirie de la FENESPCP-CI auprès de la DEPPS


Soubré, le 29-03-2024 (lepointsur.com)L’opération « Zéro clinique illégale d’ici 2025 » lancée par l’Etat de Côte d’Ivoire a effectivement débutée. Dans le District autonome des montagnes, le ministère de la santé, de l’hygiène publique et de la couverture maladie universelle à travers la Direction des Établissements Privés et Profession Sanitaire (DEPPS) a procédé à la fermeture systématique de plus de 200 cliniques illégales dans les Régions du Guémon et du Cavally. Mettant ainsi au chômage directement au moins 1000 employés et, en souffrance sociale, plus de 5 mille personnes, victimes innocentes de cette opération sanitaire. À terme, dans toute la Côte d’Ivoire, ce sont au moins 36.000 personnes qui seront impactées dont 6000 employés directement et 30.000 membres de leurs familles, indirectement. Devant cette situation alarmante à l’horizon dans un contexte mondial de crise financière due à la crise sanitaire de Covid 19 et aux nombreux conflits armés, la Fédération Nationale des Etablissements Sanitaires Privés, Communautaires de Proximité de Côté d’ivoire (FENESPCP-CI) n’est pas sans voix. Depuis la ville de Soubré, tout en reconnaissant tout de même le caractère judicieux de cette opération d’assainissement qui vise la régularisation des activités du secteur sanitaire privé en Côte d’Ivoire, M. Ali KOITA indique toutefois que la fermeture systématique des cliniques privées, loin de résoudre efficacement la situation d’illégalité, elle pourrait contribuer davantage a creuser l’abcès. D’où l’invitation de la tutelle à instituer des programmes de formation et de renforcement descapacités opérationnelles à l’attention des agents de la santé privée afin de faire d’eux, de véritables partenaires efficaces du public.

Plaidoirie pour la mise en place d’un système de surveillance des cliniques sanitaires privées

« Il est temps pour les autorités ivoiriennes de prendre des mesures identiques à celles mises dans le secteur de l’hòtelerie. Ceci permettra à l’État d’avoir un regard dans les activités que nous menons sur toute l’étendue du territoire national. Dès lors, l’État peut faire un suivi et nous rappeler à l’ordre, au besoin. Et les districts sanitaires sont des institutions sanitaires de référence dont les compétences sont reconnues pour la mise en œuvre théorique et pratique de cette politique opérationnelle ».

SOS pour les milliers de familles au chômage

« Dans le Guémon et le Cavally, nous avons au moins 240 cliniques privées fermées qui emploient au minimum directement 5 personnes soient 1200 agents qui sont aussi responsables de leurs familles, en raison de 5 personnes par famille vu la taille de la famille africaine. Il faut donc protéger ces praticiens et protéger les populations qui fréquentent leurs cliniques. Avec au moins 1.200 cliniques privées fermées, ce sont plus de 36.000 agents de santé privée et leurs familles qui vivront dans la misère dans un contexte mondial marqué par diverses crises ».

Le caractère salutaire de l’opération « Zéro clinique illégale d’ici 2025 »

« Nous saluons l’opération « zéro clinique illégale d’ici 2025″ parce-qu’elle nous permettra d’aller à la régularisation. Sauf que la fermeture systématique n’est pas la solution car ce sont des gens qui se sont engagées dans ce secteur pour secourir les populations parfois au prix de leur vie quand l’État était absent en certains endroits comme ce fut le cas en période de crise militaro-politique de 2002 à 2010 et lors de la crise post-électorale de 2010 à 2011 ».

Les dangers liés à la fermeture systématique des centres de santé privée

« Quoi qu’il en soit, les populations convergeront toujours vers ces centres et leur fermeture va favoriser le travail nocturne voire clandestin. Des gens vont se cacher pour travailler dans le but de subsister. C’est là tout le grand danger. Ici, la DEPPS ne ferme pas la mentalité des gens illégaux ni leur proximité avec leurs proches. Ces gens illégales ont pourtant des cliniques qui totalisent plusieurs années d’existence, elles ont des carnets d’adresse si importants qu’elles continueront à exercer dans des domiciles, à la demande des populations. Et les dégâts qui en découleront seront difficiles à gérer puisqu’il n’y aura point de référence. C’est tout ce que nous voulons éviter. Nous saluons certes l’avènement de cette opération d’assissement de notre secteur qui à terme doit nous obliger à nous former et à établir des rapports de franche collaboration avec les autorités sanitaires ivoiriennes ».

Les avantages d’un traitement spécial et légal pour le secteur sanitaire privé

« L’État doit renforcer régulièrement nos capacités opérationnelles soit par les professeurs de l’INFAS ou par les districts sanitaires pour que nous soyons plus utiles à la population qui de plus en plus s’est accoutummée à notre proximité et notre promptitude. Un chronogramme de formation bien établi nous permettra d’être efficaces. Quand le travail est coordonné, il n’y a pas de problème de référencement comme c’est le cas aujourd’hui où les populations fréquentent peu les centres de santé publiques pour cause d’accueil et d’orientation. Car quand les populations se baladent dans les hôpitaux, elles deviennent les proies des agents verreux toujours aux aguets pour les voler. Si nous sommes mieux outillés, nous servirons de couroie entre les populations et les établissements publics connus de tous. C’est parce-qu’il y’a un déficit de communication que les gens se cachent pour agir. Ils agissent clandestinitement donc pour éviter d’être interpellés. En clair, nous souhaiterions qu’au terme de cette opération, il y ait une franche collaboration entre le privé et le public pour que nos patients soient bien reçus par dans le public ».

Les raisons de la fréquentation du secteur sanitaire privé par les populations

« Car s’il n’y a pas de références sincères, les populations auront toujours peur d’aller vers les établissements sanitaires publics. Ils sont certes de l’État mais il ya beaucoup de choses à corriger à leur niveau. Ce sont les mauvais accueil, le temps de réception trop long, les rackets, les vols, les prescriptions fantaisistes d’ordornances par chaque médecin qui prend service et j’en passe. La mise en œuvre de la norme qualité des services dans le secteur sanitaire dout donc toucher le public. Pour le secteur privé, elle est salutaire sauf que la fermeture systématique des établissements illégaux va engendrer des situations que nous ne pourrons pas gérer ».

Le mot de fin du président de la FENESPCP-CI

« Nous demandons à l’État de Côte d’Ivoire de nous écouter, de nous entendre afin que nous puissions exercer légalement car loin d’être attirés par l’argent ou d’être des criminels, nous oeuvrons pour le bien-être des populations, là où parfois les structures sanitaires étatiques n’existent pas, là où la distance qui sépare les structures sanitaires des populations est parfois énorme. Nous sommes conscients de notre rôle et c’est pourquoi nous plaidons pour un traitement particulier devant nous permettre d’exercer en toute légalité et en toute quiétude ».

Interview réalisée et retranscrite par
Laine Gonkanou, Correspondant Régional

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