Commémoration de la 27 è journée de l’Enfant africain Déclaration du Forum des ONG et Associations d’Aide à l’enfance en difficultés
A l’occasion de la commémoration de la 27ème Journée des Nations Unies relative aux Droits de l’Enfant, le Forum des Ong et Associations d’Aide à l’Enfance en Difficulté, voudrait féliciter l’Etat de Côte d’Ivoire pour son engagement en faveur de la Protection de l’enfant en Côte d’Ivoire.
Nous notons en effet avec satisfaction entre autres actions, la mise sur place du Conseil National de Famille, la création du Comité National de Surveillance des Actions de lutte contre la traite, l’exploitation et le travail des enfants présidé par la Première Dame Madame Dominique Ouattara,l’élaboration d’une Politique Nationale de Protection de l’Enfant et d’une politique nationale de protection judiciaire de l’enfance et de la jeunesse, la création de la direction de l’assistance aux pupilles de l’Etat,
pupilles de la nation, la mise en place des lignes 116,107 et d’un code de conduite pour les enseignants, le décret pour l’établissement exceptionnel des extraits de naissance des enfants nés pendant la crise, l’école obligatoire pour tous les enfants jusqu’à 16 ans, l’augmentation du volume horaire de l’enseignement primaire, la prise de 2 circulaires relatives à la répression du viol et à la réception des plaintes consécutives aux violences basées sur le genre et la soumission du rapport initial sur la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’enfant (Cadbe) en 2015,etc…
Toutes ces mesures contribuent à apporter des réponses aux exigences de la Protection de l’Enfant en Côte d’Ivoire. Il est aussi bon de souligner à ce stade, la soumission du rapport complémentaire de la société civile sur la Cadbe par le Forum des ONG avec l’appui technique et financier de Save the Children.
Cependant il existe encore des zones d’ombres dans l’action de l’Etat en faveur des enfants qu’il importe pour nous de relever en cette journée commémorative.
Au titre des mesures d’application Générale, la Côte d’Ivoire a ratifié deux protocoles facultatifs à la Convention des Droits de l’Enfant sur trois (3).
La société civile salue les efforts de l’Etat dans la mise en œuvre des mesures générale d’application des droits de l’enfant par l’adoption d’une politique nationale de protection de l’enfant, renforcée par une stratégie nationale de lutte contre les violences basées sur le genre, la politique nationale de la protection judiciaire de l’enfance et de la jeunesse, la création de la commission nationale des droits de l’homme (Cndhci) et du conseil spécial du Médiateur de la République en charge des questions de l’ enfant
Cependant, nous constatons
- l’absence d’un code de l’enfant
- la non-conformité de certains textes avec les standards régionaux et internationaux
- la faible application des textes de lois ou règlements existants
- l’inexistence d’une base de données intégrée au niveau national sur les droits de l’enfant
- Les retards dans la soumission des rapports régionaux et internationaux dus à la non opérationnalité des structures chargées de porter le plaidoyer au niveau étatique.
- La recrudescence de la traite et des pires formes de travail des enfants
Selon l’analyse situationnelle réalisée en 2014 l’UNICEF «on estime à 155.149, le nombre d’enfants travaillant de façon dangereuse ou abusive dans la production de cacao. La traite toucherait 77.782 enfants en Côte d’Ivoire selon les dernières estimations »
- Bon nombre d’enfants travaillent dans les décharges d’ordures, dans les sites clandestins d’orpaillage violant ainsi gravement leur droit à la santé, à l’éducation et à la protection
Sur la question de la définition de l’enfant, nous constatons
- L’incohérence dans les différents textes nationaux qui donnent des âges différents : majorité pénale 18 ans, la majorité civile à 21 ans, travail des enfants, fixé à 14 ans.
Sur le respect des principes généraux, nous constatons
- le Non-respect du principe de non-discrimination
- le non reconnaissance des enfants adultérins et des enfants nés du commerce incestueux.
- la non application de la loi d’orientation en faveur des Personnes Handicapées
- L’insuffisance des structures d’accueil des enfants en situation de handicap
- L’absence de données statistiques centralisées sur la problématique du handicap
Au titre du droit à la vie, à la survie et au développement de l’enfant, nous constatons que
- le taux de mortalité infantile reste toujours élevé (de 66,06% en 2011 à 58,70% en 2015 soit une réduction de 7,36%.
En ce qui concerne la participation de l’enfant, nous constatons
- le non-respect des standards de la participation à travers le parlement des enfants de Côte d’ivoire.
- L’insuffisance de la prise en compte de la voix des enfants dans les lois et politiques qui les concernent
Sur la question de l’enregistrement des naissances nous constatons :
- 2.800.747 enfants de 0 à 17 ans non déclarés à l’état civil (Etude Unicef 2014)
- 700000 personnes sont apatrides dont (nombre d’enfants)
En ce qui concerne les abus et mauvais traitements, nous constatons
- 87% des enfants sont victimes de maltraitances psychologiques
- Une fille sur quatre âgées de 15-17 ans (25%) et un tiers des filles de 15-19 ans (31%) ont été victimes de violences physiques depuis l’âge de 15 ans.
- 1129 cas de viols entre 2012 et 2015 dont 66% concernent les enfants
- la question des enfants associés à des gangs armés communément appelés « Enfant Microbe » ne connait pas de réponses favorables pour les communautés et les enfants eux-mêmes.
En ce qui concerne les enfants privés de leur milieu familial, nous constatons
- La non réglementation des structures d’hébergements temporaires
Pour ce qui est de la réunification familiale, nous constatons que
- la Côte d’Ivoire ne dispose pas de cadre légal et réglementaire en matière de réunification familiale.
En ce qui concerne, la santé et le bien-être, nous constatons
- le difficile accès des examens médicaux et du matériel de technologies fonctionnelles aux enfants en situation de handicap
Au niveau de l’éducation nous constatons que
- 18% d’enfants en âge scolaire (6 à 12 ans) ne vont pas à l’école
- 4 enfants sur 10 ne terminent par le cycle primaire malgré la loi sur l’école obligatoire pour diverses raisons
- Les programmes de l’enseignement professionnel ne sont pas adaptés aux besoins des entreprises
- Les diplômes délivrés par les structures privées de formation pour enfant vulnérables ne sont pas reconnus par l’Etat
Pour ce qui est du cas des enfants en conflit avec la loi, nous constatons
- plus de 80% des mesures prises par les juges des enfants sont des peines privatives de liberté
- La séparation des mineurs d’avec les adultes n’est pas effective dans la majorité des cas
- Les bébés vivent toujours en prison avec leur mère
- Les centres d’observation des mineurs (Com) d’Abidjan et de Man qui sont en principe des centres alternatifs à la prison, se trouvent malheureusement au sein des maisons d’arrêt et de correction d’Abidjan et de Man
En ce qui concerne les enfants en situation d’exploitation sexuelle et de violence sexuelle, Nous constatons
- un dysfonctionnement du système de référencement des plates formes des SGBV
- Le paiement du certificat médical pour les cas de violences sexuelles par les victimes
La protection des enfants est une responsabilité collective ; aussi le Forum des ONG voudrait appeler les démembrements de l’Etat, les collectivités locales, les communautés et les familles à soutenir l’Etat dans sa politique de protection des enfants.
Le Forum des ONG et Associations d’aide à l’enfance en difficulté qui se veut une force de propositions et d’actions pour un environnement protecteur des enfants et une culture de protection des enfants en Côte d’Ivoire renouvelle ici son engagement à continuer d’œuvrer aux côtés de tous les acteurs pour une Côte d’Ivoire émergente digne de ses enfants.
Fait à Abidjan le 20 Novembre 2016
Le Comité Directeur